Vers un Numérique Responsable de Vincent COURBOULAY

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Extrait : Le numérique a une vision d’avance, mais plusieurs morales de retard.

Telle une Alice moderne, quelles vérités découvririons-nous en passant l’autre côté du miroir numérique ?

Une réalité qui débute dans la ville-préfecture de Baotou en Chine, en République démocratique du Congo, en Amérique du Sud, dans le triangle ABC (Argentine, Bolivie, Chili) et dans beaucoup d’autres endroits. Chaque fois, c’est une histoire identique qui se répète dans toutes ces régions dites “en développement”, une histoire vieille comme le monde, d’exploitation des richesses locales au profit des puissants, proches ou lointains, et de délocalisation des pollutions majeures.

Car non, la réalité du numérique ne commence pas lorsque nous, consommateurs, ouvrons une boîte design en carton recyclé et raccordons notre tout nouvel appareil en attendant fébrilement qu’il s’allume et affiche un superbe écran d’accueil.

Ceci est un mythe que l’on propage via des campagnes de communication à plusieurs millions de dollars9, mais la réalité masquée est presque toujours violente, nauséabonde et hyperpolluante.

Plutôt que de se cacher derrière un écran qui reflète nos propres désirs, il est urgent que nous ouvrions une fenêtre sur le monde, pour être conscients des drames qui se jouent sous nos yeux. Mais les enjeux financiers et politiques sont tels, les investissements dans les nouvelles technologies si importants, l’utilisation des sous-traitants dans des pays à bas coût si généralisée qu’il est vraiment difficile de savoir ce qui se cache derrière l’industrie du numérique tout au long de ses cycles de vie. Une des complexités de cette tâche réside dans le fait d’avoir une approche cohérente et globale, quasi scientifique. Une approche qui permet d’éviter de passer d’un mythe à l’autre et de participer, sans le vouloir, à diffuser des clichés, contrevérités ou erreurs.

Les matières premières, droit d’inventaire

Littéralement, que se cache-t-il derrière l’écran ?

Si l’on prend l’exemple d’un smartphone, pas moins de 70 matériaux sont nécessaires à sa fabrication11, et cela sans compter l’énergie primaire nécessaire à la fabrication (pétrole ou charbon).

On estime entre 30 à 50 % de matières plastiques plus ou moins recyclables, 10 à 50 % de verres et céramiques et 10 à 50 % de métaux utilisés pour confectionner nos téléphones.

En ce qui concerne les métaux, on compte 80 à 85 % de métaux ferreux et non ferreux tels le cuivre, le zinc, l’étain, le chrome et le nickel ; 0,5 % de métaux précieux tels l’or, l’argent, le platine et le palladium ; 0,1 % de terres rares et 15 à 20 % d’autres substances comme le magnésium, le carbone, le cobalt ou le lithium12.

Tous ces matériaux nécessitent évidemment d’être extraits de la croûte terrestre et purifiés, et pour ce faire, il faut beaucoup d’énergie (pétrole et charbon) ainsi que des produits chimiques pour raffiner les roches extraites.

L’ACV va nous permettre de prendre en compte tous ces éléments dans une analyse exhaustive des impacts environnementaux de la fabrication des smartphones.

Parmi cette liste, il est intéressant de s’attarder sur les 0,1 % de terres rares. Elles sont régulièrement mises en avant du fait de l’impact environnemental lié à leur exploitation.

Les terres rares sont un groupe de métaux aux propriétés voisines comprenant le scandium, l’yttrium et les quinze lanthanides (métaux finissant souvent par “ium4”). Longtemps ignorées par l’industrie, elles sont devenues, grâce à leurs propriétés physico-chimiques, ce que l’on pourrait appeler “les vitamines du numérique”, à savoir qu’elles sont très utiles en très faible quantité. Les terres rares sont ainsi présentes dans de nombreux objets comme les panneaux photovoltaïques, les batteries rechargeables, les éoliennes, les écrans plats afin de doper leurs capacités de stockage, de magnétisation ou de durée de vie. Les smartphones actuels ne contiennent que quelques milligrammes de ces terres rares, contre quelques grammes pour les métaux tels que le fer13.

Ces métaux ne sont pas rares à proprement parler. Ils sont beaucoup plus présents dans la croûte terrestre que l’or ou l’argent, par exemple. Certains, comme le cérium, sont aussi répandus que le cuivre. Mais alors pourquoi les qualifie-t-on de rares ? La raison est qu’on en trouve partout dans le monde, mais en très faible quantité par tonne de roche extraite.

Il faut donc extraire et traiter un grand volume de roches, ce qui multiplie les impacts car, comme toute opération d’extraction de matière première, celle des métaux rares est très polluante. Afin d’obtenir un produit presque pur, les roches doivent être raffinées. Cette opération demande de les broyer, puis de répéter une dizaine de fois des procédés utilisant pléthore de réactifs chimiques, tels que des acides sulfuriques et nitriques.

Autre conséquence, certaines roches faiblement radioactives produisent, de par leur concentration lors de leur raffinage, des déchets radioactifs en quantité non négligeable. Ainsi, bien que les déchets générés par l’exploitation des métaux rares présentent un faible taux de radioactivité, l’Agence internationale de l’énergie atomique conseille de les isoler pendant plusieurs siècles.

DE L’AUTRE CÔTÉ DE L’ÉCRAN : BIENVENUE EN HELL DORADO

REEEBOOT

E -SCLAVAGE MODERNE

L ’ARGENT NE FAIT PAS L’EBONHEUR

INCONNU À CETTE ADRESSE

TOUTES LES INFORMATIONS NE SE VALENT PAS

ENTRE RÊVE ET R-IA-LITÉ

UNE JOURNÉE NUMÉRIQUE RESPONSABLE

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